Joker (2019)

Le film « Joker » s’articule autour du personage icônique de Joker. Le principal avantage de cette oeuvre est qu’elle réinvente les origines du Joker de manière originale et détachée de tout ce qui a été fait auparavant dans les précédents Batman.

Todd Phillips, le réalisateur, mène le jeu d’acteur de Joaquin Phoenix de main de maître en montrant un homme qui lutte pour trouver sa voie dans la société fracturée de Gotham. Pris dans une existence cyclique, n’arrivant pas à se détacher de son rôle de comique raté, Arthur Fleck devient le Joker suite à une mauvaise décision prise au mauvais moment. Attention : ce film est avant tout une étude de personnage en profondeur, moins un film d’action pur et dur.

Joker : une étude psychologique, plutôt qu’un film de super-héros

Ce film est loin d’être un blockbuster ou un simple film de divertissement, comme la plupart des films du genre. Il se concentre sur le psychisme du personnage principal, qui s’effondre lentement sous la pression de la société.


L’acteur Joaquin Phoenix fait une performance merveilleuse, méritant à coup sûr une nomination aux Oscars. Son approche du Joker diffère de celle de l’acteur Heath Ledger (1979–2008) son célèbre prédécesseur… Mais je dirais que les deux sont tout aussi bons. On peut résumer ainsi leur principale différence :

  • Le joker de Ledger est un rationnel qui agit comme un fou
  • Le Joker de Phoenix est fou jusqu’au bout des ongles

Un film de super-héro ?

Bien qu’il s’agisse d’un film sur un méchant super-héros, Joker est de loin supérieur à la plupart des films du genre (sauf peut-être la trilogie du Chevalier Noir de Christopher Nolan, mais Joker est du même niveau).

C’est un film moins ambitieux, mais avec un style distinct et des références très cinématographiques sans être forcées. Les références les plus notables sont les similitudes avec « Taxi Driver » de Scorsese, La Valse des Pantins mais aussi « Les Temps Modernes » de Charlie Chaplin.

Robert De Niro et Zazie Beetz
Robert De Niro et Zazie Beetz, deux acteurs du film

J’ai hâte de voir plus de films non comiques de la part de Todd Phillips. Joker est manifestement un des meilleurs films de 2019.

L’homme Arthur Fleck derrière le Joker

L'homme Arthur Fleck
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Joker : une comédie noire

Joker (2019) est un film tragique, une comédie noire, un chef-d’œuvre de narration cinématographique.

Le réalisateur Todd Phillips, après plusieurs questions sur sa capacité à réaliser un film valable sur le Joker, nous livre un film classique qui restera à jamais gravé dans la mémoire. Phillips déconstruit le genre du super-héros et le met sens dessus dessous, créant un film indépendant et artistique plutôt qu’un film de super-héros de type « blockbuster ».

Chaque scène du film semble avoir un but précis. Todd nous montre un amour pour son histoire et un soin maniaque dans la manière de la présenter. Et c’est pour cela que Todd Phillips doit être loué.

Le réalisateur navigue dans les complexités du personnage du Joker, et pourtant, à aucun moment le film ne faiblit. Chaque nouvelle scène semble relancer l’histoire. Ça ne s’arrête jamais, jusqu’à vous surprendre lorsque vous vous voyez applaudir bêtement avant même le générique de fin!

→ Joachin Phoenix de dos dans Joker

Joachin Phoenix de dos dans Joker
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→ Une tragédie qui semble vécue

Les détails du film sont remarquables, car Todd Phillips a non seulement une bonne écoute du film, mais en plus il a carrément un pied dedans. Il le vit.

A regarder son oeuvre, on sent les rues désagréables et pleines d’ordures de Gotham, et on savoure l’utilisation prudente et stratégique du symbolisme. Pour que le film reste brillant, il fallait un acteur sublimant le tout. L’acteur Joaquin Phoenix détonne tout simplement dans le rôle.

L’interprétation de Joaquin Phoenix

Phoenix offre la performance la plus époustouflante d’un film des années 2000, et peut-être l’une des performances les plus mémorables de tous les temps. Alors que le personnage est déjà complexe, Phoenix se plonge tellement dans le rôle que vous pouvez à peine le reconnaître. Il est tantôt drôle, tantôt délicat, tantôt innocent et toujours tragique, déchirant, imprévisible. Grâce à son jeu complexe sur les émotions d’Arthur Fleck, Phoenix devient l’incarnation du Joker.

Joker est-il devenu le meilleur film de BD de tous les temps ? Pour la plupart des cinéphiles, ce sera la question.

Ce film transcende le genre d’une manière qui n’a pas été faite depuis 2008. Alors qu’il ressemble plus à une tragédie ou même une comédie noire qu’un film de super-héros (imaginez un film indépendant avec des personnages DC), il reste un film de super-héros ou de super-vilains. Quelle est donc sa position par rapport aux Batman précédents ? Il est dans le top 2, rivalisant sans aucun doute avec The Dark Knight.

Le film, au final, ressemble à une étude approfondie d’un des personnages les plus complexes du monde la BD, un homme aux prises avec des problèmes psychologiques et de santé qui veut simplement faire rire les gens dans les hopitaux. Malheureusement, sa santé mentale et la société dépressive qui l’entoure ont raison de sa joie de vivre.

Film Joker par Todd Phillips
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Dans les rues, sur son lieu de travail, chez sa mère, il est vu comme quelqu’un de trop bizarre. Le point de rupture l’amène à commettre un meurtre, puis à devenir un symbole de terreur et de chaos pour l’ensemble de la ville. A chaque instant il arrive quelque chose de mal à Arthur Fleck, on ressent de la tritesse et de la compassion pour lui, on pleure de le perdre parce qu’il ne ressemble pas à quelqu’un désireux de faire le mal.

L’interprétation de Robert De Niro

J’ai apprécié chaque seconde le personnage du Joker qui ne cesse de s’effondrer sur lui-même, mais il ne faut pas oublier les personnages qui l’entourent.

Je pense que le personnage de Zazie Beetz était totalement inutile et aurait dû être coupé au montage. C’est probablement mon seul point négatif avec ce film, avec le reproche que je fais en conclusion de cet article.

Ce qui m’a plu, c’est la réflexion sur la situation actuelle de la société qui dépasse le thème du super-héro.

La scène du troisième acte où le Joker apparaît en direct à la télévision lors d’un spectacle de Murray Franklin – qui a été montrée dans la bande-annonce finale – m’a époustouflé tant les tensions, la grandeur de Phoenix et le jeu de Robert De Niro sont impeccables.

Pour mémoire, le personnage Murray Franklin joué par Robert De Niro est un animateur de talk-show qui a contribué à la ruine du Joker. De Niro a déclaré dans une interview que son rôle rendait délibérément hommage à son personnage dans « La Valse des Pantins » de Martin Scorsese tourné en 1983. Dans ce film, il incarnait un comique de milieu de gamme qui enlève un animateur de talk-show dont il est obsédé. Jetez un coup d’œil à l’extrait ci-dessous.

Scène jouée par De Niro dans Joker

Le début d’un reboot ?

→ Joker est-il le début d’une nouvelle trilogie?

On peut l’espérer, tant ce film ressemble à un nouveau démarrage de la franchise Batman. L’histoire de l’origine du Joker, autonome, est impeccable du début à la fin et fait écho aux meilleures bandes dessinées Joker du passé.

→ BD : Batman Dark Joker The Wild, publié par DC Comics en 1993

  • Ecriture : Doug Moench
  • Dessin : Kelley Jones
  • Encrage : John Beatty
  • Coloriste : Les Dorscheid
  • Lettres : Todd Klein
Bd Joker
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Dans le film, Joaquin saigne, transpire et pleure jusqu’à la dernière goutte dans une performance magnifique. Heath Ledger serait fier de lui. C’est sans aucun doute la plus grande performance d’acteur depuis Heath Ledger.

La mise en scène et l’écriture sont excellentes et les tonalités sombres savamment dosées.

→ Un seul défaut : la cohérence du personnage

Bien que ce film soit réalisé avec compétence, il peut laisser perplexe quant aux décisions prises sur le personnage du Joker.

J’ai toujours pensé que le Joker était intéressant en raison de ses origines mystérieuses et du chaos qu’il génère contre le système établi.

La version du film montre un homme qui ne déclenche pas le chaos parce qu’il en a marre du système, pas du tout. Il le fait par accident et ensuite, parce que tout le monde le met sous le feu des projecteurs. Le Joker de Todd Phillips accepte simplement son rôle. On perd au passage l’idée de révolte contre la société.

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